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Christ Notre Pâque (François-Xavier Durrwell)

Nouvelle Cité, 2001, 253p.
C.B.

Le religieux rédemptoriste reprend le sujet qu’il a médité toute sa vie depuis son livre bien connu aujourd’hui, paru en 1950, La Résurrection de Jésus, mystère du salut, qui, à partir d’une investigation scripturaire et patristique poussée, soulignait la place décisive que devait prendre la Résurrection dans toute théologie de la Rédemption, place que la réflexion occidentale avait parfois eu tendance à minimiser au fil des siècles.

Cet essai livre une réflexion synthétique et accessible, presque un « testament spirituel », qui s’apparente plus à une méditation qu’à une recherche systématique. Il se veut une tentative de cerner l’unité profonde du mystère pascal et l’intime complémentarité de ses deux pôles, la mort et la Résurrection, le sacrifice et la glorification… Il s’agit de montrer qu’une théologie du mystère pascal, que l’auteur appelle de ses vœux, ne diminue en rien l’importance de la mort du Christ et de sa puissance salvatrice, à travers une réflexion suggestive sur le lien entre la temporalité de Jésus et l’éternité du Fils. A vrai dire, les formules utilisées ne s’appuient pas sur un travail conceptuel fouillé mais proposent des paradoxes très stimulants : partant du dogme de l’« engendrement éternel » du Fils, F.X. Durrwell tente de penser une mort « éternisée » du Fils, qui ressuscite « en demeurant dans la mort » (p.55) parce que la mort glorifiante du Fils est offrande et acte filial, ce qui l’amène à défendre une quasi simultanéité de la mort et de la Résurrection dans le Christ.

L’auteur reprend également, dans une perspective très ambitieuse, sa lutte contre la « théologie juridique », entendons une sorte de caricature de la théologie médiévale de la satisfaction (d’inspiration anselmienne) avec le souci de reconstruire une autre théologie à partir du mystère pascal. Du point de vue de la Rédemption, il critique avec une certaine efficacité l’idée du Christ qui se substitue au péché pour satisfaire à la justice divine, en insistant sur le lien entre la solidarité de Jésus avec les hommes et sa sainteté de Fils exempt du péché. Il est regrettable de ne pas voir F.X. Durrwell expliciter certaines de ses intuitions, notamment lorsqu’il accuse nombre de sotériologies récentes d’être trop dépendantes de la théologie juridique : on y trouve pêle-mêle la Dramatique divine de Balthasar, J. Moltmann et J.Moingt (p.63)…

Au fil des pages, il propose également une ecclésiologie et une théologie des sacrements. La théologie juridique risque ainsi, selon lui, de faire porter toute la réflexion sur une conception de l’Église réduite à une institution hiérarchique où l’on oublie « l’Église-communion », elle met trop l’accent sur la réitération d’un acte sacrificiel dans l’eucharistie au lieu de souligner la présence… Au sein d’une démarche qui privilégie avec sagacité la relation à un mystère que ne cesse de rendre présent l’Église vivante, qui n’est pas clos dans le passé mais au contraire sans cesse offert à nos yeux comme un tout vivant, on regrettera peut-être, dans ces dernières pages, un certain excès dans la présentation de l’histoire de la théologie, réduite à un oubli multiséculaire des intuitions patristiques, au profit de formules parfois contestables.

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