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Chronique sémantique : ORIENT

Benedictus

La lecture du dictionnaire parfois suscite une émotion poétique : « Un des points cardinaux, côté de l’horizon où le soleil se lève » énonce le petit Robert à l’entrée « orient ». De fait, le verbe latin d’où nous vient ce mot, orior, « je me lève », a la même racine que le substantif origo, « naissance, origine ». Voilà qui explique tant de connotations positives dont le mot « orient » est chargé en français, connotations plus implicites et sous-tendues par le langage que couramment exprimées : renaissance, renouveau, lumière.

C’est dans ce registre que se plaçait le pape slave, issu de ce même Orient, pour nous chrétiens de « l’Europe de l’Ouest », quand il intitulait la lettre apostolique qu’il publia le 2 mai 1995 : Orientale lumen, « la lumière de l’Orient ». Jean-Paul II indiquait dès le second paragraphe le sens chrétien du mot : « Mon regard se tourne vers l’Orientale lumen qui resplendit de Jérusalem, la ville dans laquelle le Verbe de Dieu, fait homme pour notre salut, juif ‘issu de la lignée de David’ mourut et ressuscita ». L’Orient, avec une majuscule, c’est pour un chrétien le lieu de la constitution du peuple hébreu, et le lieu de la naissance d’un de ses membres les plus illustres, Jésus-Christ, qui nous a révélé à jamais le visage de Dieu.

L’Orient est donc un lieu, un ensemble de pays et de nations béni de Dieu. La vision du prophète Ezéchiel le manifeste en des termes dont la puissance évoque un mystère indicible : « Il me ramena à l’entrée du Temple, et voici que de l’eau sortait du dessous le seuil du Temple, vers l’orient, car le Temple est tourné vers l’orient (…). Cette eau s’en va vers le district oriental, elle descend vers la Araba et se dirige vers la mer ; elle se déverse dans la mer en sorte que ses eaux deviennent saines » (Ez 47, 1. 8). Oui, du temple érigé par le peuple juif a jailli la source qui guérit l’homme de la mort, la source qui transforme la Mer morte en un lieu de vie. C’est l’exégèse que nous donne de ce texte le disciple bien aimé de Jésus, en le relisant avec la mémoire des paroles de Jésus : « Détruisez ce temple et en trois jours je le rebâtirai » (Jn 2, 19) et avec le souvenir de sa mort sur la croix et du signe étonnant qui se produisit alors : « Mais un des soldats, d’un coup de lance, le frappa au côté, et aussitôt, il en sortit du sang et de l’eau » (Jn 19, 34).

Orient, lieu des bénédictions, lieu de la vie qui jaillit de la mort. Entre les deux se place le temps de la Passion. Cela fut vrai pour le Seigneur Jésus, de la liesse de la foule apportant les Rameaux à la solitude du calvaire. Cela est vrai aujourd’hui pour nos frères et sœurs chrétiens d’Orient, qui vivent aujourd’hui encore la persécution jour après jour, non pas seuls, mais de façon solidaire et exemplaire au milieu d’autres citoyens de ces pays, menacés ou frappés par la violence : de façon exemplaire, car ils portent en eux l’espérance de la Résurrection, celle du petit matin de Pâques, où « à l’aube, alors qu’il faisait encore sombre, Marie de Magdala se rend au tombeau et voit que la pierre a été enlevée du tombeau » (Jn 20, 1). Par Marie la pécheresse et l’évangélisatrice des Apôtres, nous est venue la nouvelle de la Résurrection, à l’heure où le soleil se lève. Par Marie l’immaculée, la mère de Jésus, la Résurrection advient en notre monde, et les souffrances de nos frères d’Orient ont leur part de cette gloire. Laissons la parole à Jean-Paul II pour conclure : « Marie, ‘Mère de l’astre qui ne décline pas, aurore du jour mystique, orient du soleil de gloire’, montre-nous l’Orientale lumen  ».

Réalisation : spyrit.net