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La fin des temps : plan-guide pour le pèlerinage de Vézelay, mai 2013

Résurrection
Comme chaque année, le pèlerinage de Vézelay organisé par la communauté Aïn Karem et ses amis comporte une partie importante de réflexions théologiques. Cette année, les échanges ont eu pour thème : « La fin des temps, cauchemar ou espérance ? » Voici le document de travail qui a aidé les missionnaires à se préparer, ainsi qu’un dossier de textes qui peut être envoyé à ceux qui le souhaiteraient (postmaster@revue-resurrection.org).

Les catholiques d’aujourd’hui ne prêtent guère attention à l’article du Credo qui déclare à propos du Christ : « Il viendra [ou « il reviendra »] dans la gloire pour juger les vivants et les morts et son règne n’aura pas de fin. » Curieusement, c’est dans les sectes et les mouvements marginaux que cette affirmation est mise en valeur, mais elle est alors souvent confondue avec une lecture apocalyptique de l’actualité ou des calculs numériques qui n’ont rien de très conforme à la vision chrétienne de l’histoire.

D’où l’intérêt de revisiter ce sujet qui fut capital pour les premiers chrétiens (lire, entre autres, les deux lettres de saint Paul aux Thessaloniciens et la deuxième de Pierre) et d’y porter quelques lumières.

I – Le vocabulaire

L’expression la « fin du monde » n’est pas biblique, malgré les traductions.

Les derniers jours (en grec eschata, d’où eschatologie) : Is 2, 2 ; Jn 6, 44 (au singulier).

L’avènement du Fils de l’homme (littéralement, la présence) : Mt 24, 3, d’où le terme de Parousie qu’on emploie parfois.

L’accomplissement du temps (ou la consommation des siècles) : Mt 13, 39 ; 24, 3 ; He 9, 26. Le mot employé est celui d’« éon » qui désigne, soit une longue période de temps (d’où la traduction par « siècle » ou « ère »), soit un espace. Le Nouveau Testament connaît l’expression « siècles des siècles » (ou siècle de siècles) pour désigner le domaine où règne désormais Dieu et le Christ.

La résurrection des justes : Lc 14, 14.

II – Un détour nécessaire : l’eschatologie dans le dessein de Dieu

Ce qui caractérise la pensée biblique, c’est l’irruption d’un avenir. Avec l’aventure d’Abraham, tiré vers un futur encore largement indéterminé, surgit la petite flamme de l’espérance dans un monde conçu jusque-là comme le domaine de l’éternel retour (conceptions cycliques du temps, histoire humaine comme transposition dégradée du domaine des dieux). Une double réflexion s’impose à partir de là : l’homme est situé par rapport à ce dont il vient (la Genèse, la protologie) mais aussi par là où il va (l’Apocalypse, l’eschatologie). L’histoire biblique se structure ainsi entre mémoire et promesse, les deux se développant de pair.

A. Dieu, la création et le mal

1. La création

La foi chrétienne affirme dès le début une création, qui n’est pas un épanchement du divin sur terre, mais l’acte libre d’un Dieu qui a un projet, et un projet d’amour. C’est un acte radical qui pose à la fois la plus grande distinction (Dieu n’est pas une partie du monde, fût-ce la plus haute ; le monde n’est pas divin), mais aussi la plus grande proximité (Dieu a voulu l’homme comme son image, il lui destine une ressemblance avec sa vie la plus intime). Dieu voulait « mener à la gloire un grand nombre de fils » (He 2, 10) dans son Fils.

Contre toute forme de manichéisme, l’Écriture nous montre que cette création est « bonne » et même « très bonne » (Gn 1, 10.31). Le mal et la mort n’y ont pas de part : « car Dieu n’a pas fait la mort, et il n’éprouve pas de joie de la perte des vivants. Il a créé toutes choses pour la vie ; les créatures du monde sont salutaires ; il n’y a en elles aucun principe de destruction, et la mort n’a pas d’empire sur la terre. Car la justice est immortelle. » (Sg 1, 13-15)

2. Le mal

Le mal n’est pas inscrit dans l’être, ni comme une fatalité, ni comme le prix à payer d’un progrès. Il n’est pas l’ombre qui fait ressortir la couleur, ni la douleur qui fait ressentir le soulagement. Toutes ces approches, nées de notre expérience d’un mal déjà là, doivent céder devant l’innocence de la création et l’absolue bonté de Dieu, qui est Père.

Le mal résulte d’une péripétie, dont Dieu a accepté le risque, mais qu’il n’a pas voulue comme telle. La possibilité de cette péripétie n’est pas une faille dans la création, un défaut de fabrication, mais le signe au contraire de la haute vocation des créatures libres, la marque de l’ambition qui était celle de Dieu sur elles. L’homme (et l’ange) ne se réalise pas dans un sûr instinct qui le porterait infailliblement vers un but inscrit dans ses gênes. Il atteint son bonheur, son vrai bonheur, dans le don de tout son être à ce Dieu pour lequel il a été fait. Ce saut, cette trajectoire non écrite, est une réponse risquée, car il suppose l’abandon de toutes les sécurités de l’avoir, pour apprendre l’amour. Mais il est seul digne de l’homme aimé de Dieu.

3. Le péché des origines

Le mal, quand il s’est insinué dans le cœur de l’homme, désorganise tout son être, sans faire disparaître la bonté foncière de la création. Il lèse sa dimension corporelle, car l’homme est un dans le projet divin et tout son être – cœur et chair – est fait pour Dieu ; lorsqu’il est coupé de sa source, sa chair elle-même en pâtit et devient vulnérable. De même, il est atteint dans sa dimension sociale, car l’homme dans l’intention de Dieu n’est pas un individu isolé, il est famille, promis à former avec ses semblables un corps harmonieux : le péché, en touchant la tête de ce corps (Adam), blesse l’humanité entière.

Les anges, qui ne sont pas corporels et ne naissent pas les uns des autres (chaque ange est une espèce), connaissent une situation différente. Ceux qui, dans un choix premier, ont rejeté l’amour et se sont séparés de Dieu, restent immortels mais sont installés à jamais dans leur refus. Les dons de Dieu étant sans reprise, celui-ci ne leur retire pas le pouvoir qu’ils exerçaient, à l’égal des bons anges, sur la nature. D’où les désordres de celle-ci.

B. La victoire sur le mal en Jésus

La réponse de Dieu à cette situation manifeste sa plus haute sagesse. Dieu ne réprime pas le mal en l’éradiquant par un geste autoritaire. S’il remettait l’homme dans sa situation de départ, il l’infantiliserait inutilement, et la même péripétie pourrait survenir ultérieurement. S’il arrangeait les conséquences du mal au coup par coup, cette impunité sans réel retournement maintiendrait l’homme dans son inconséquence et son incapacité.

Puisque l’homme fuit devant lui (Gn 3, 8), Dieu s’abstient de le poursuivre dans ses derniers retranchements, ce qui risquerait d’aggraver encore sa situation. La mort elle-même devient une mesure de préservation qui empêche la perpétuité de l’expérience du mal. Mais Dieu prévoit déjà le moyen par lequel il va vaincre le mal sur son terrain, dans cette chair humaine issue de la lignée de la femme (Gn 3, 15).

Plutôt que de porter remède aux symptômes du mal (la souffrance et la mort), Dieu attend le moment de vaincre le péché à sa racine, dans un cœur d’homme. Mais, pour cela, il faut un être à la fois complètement de notre côté et si uni à Dieu que sa liberté soit entière et sa capacité d’aimer infinie. Jésus, dans des conditions extrêmes, parvient à donner à Dieu l’unique réponse satisfaisante qui rattrape tout le péché de l’humanité. Là où Adam avait voulu le don sans le Donateur, Jésus s’offre au Père en acceptant d’être privé de tout, jusqu’à la déréliction absolue, pour garder le lien avec lui et avec les autres hommes.

C. Les étapes du salut

1. La Résurrection

La victoire de Jésus sur le mal est totale et elle obtient tout de suite, dans la Résurrection, sa pleine reconnaissance par le Père : désormais il y a un homme qui vit de la vie que Dieu voulait pour l’humanité, dans la pleine maîtrise de son corps, à jamais séparé de la mort. Mais, avant que cette victoire atteigne l’humanité entière et qu’elle puisse changer la situation concrète de chacun des êtres humains, il faut passer par plusieurs étapes.

2. La Justification (pouvoir ne pas pécher)

La vitalité du Christ ressuscité atteint d’abord dans le baptême chaque cœur humain qui s’ouvre à lui par la foi, elle met ainsi fin à l’antique séparation entre l’homme et Dieu et fait passer le courant de la vie divine en lui. Par les dons de foi, d’espérance et de charité, elle établit une tête de pont sur la terre, où apparaît déjà comme une première fleur du Royaume.

Pourtant cette première « touche » n’est qu’un début, les séquelles du péché originel sont toujours là, la volonté est encore malade de sa convoitise et le corps est toujours victime de la souffrance et de la mort. Il faudra toute la cure sacramentelle jusqu’à la dernière onction pour neutraliser le péché dans tous les recoins de l’être humain, et surtout cela ne se fera pas sans un combat spirituel de tous les instants.

Pour tous ceux qui n’auront pas été en contact avec la prédication de l’Église, le Seigneur, par d’autres voies que nous en connaissons pas, mais toujours issues du Christ et de l’Église, les rejoint là où ils en sont, leur propose la lumière et, s’ils l’acceptent, leur fait faire ce même chemin.

3. L’ultime adhésion (ne plus pouvoir pécher)

L’homme au moment de sa mort est confronté une première fois à l’amour de Jésus qui met toute sa vie à nu et, s’il trouve en lui l’ouverture nécessaire, donne d’emblée à son âme l’accès à la vie bienheureuse. Si cette ouverture existe, sans que toute la vie soit encore unifiée autour du Christ, il y aura place pour un temps de purification dans la souffrance d’être encore séparé de son Bien suprême. Si l’homme s’est fermé et s’il a refusé définitivement son cœur à Dieu, celui-ci respecte ce choix monstrueux, qui fera son malheur éternel.

4. La glorification (ne plus pouvoir mourir)

L’humanité n’est pas une série indéfinie, elle a une forme, car elle a été voulue, dès le début, comme un corps composé de membres divers et complémentaires. C’est pourquoi Dieu, qui engrange peu à peu les âmes des sauvés, attend que le dernier être qui la compose ait répondu à son amour, pour mettre fin à l’expérience présente. Alors l’humanité – n’ayant plus à s’accroître, le dernier convive étant arrivé (cf. He 11, 40) – pourra se mettre à la table du Seigneur, qui à ce moment-là apparaîtra clairement, et elle profitera enfin des biens que Dieu lui destine depuis sa création.

Mais ceci ne pourra se faire sans un ultime bouleversement, un jugement (le « Jugement dernier ») qui mettra à nu, non plus seulement les libertés individuelles, mais toutes les réalités cosmiques ou sociales qui forment le tissu du monde présent : tout ce qui a été (même lointainement) fondé sur l’amour de Dieu sera exalté et éternisé, ce qui s’est fermé à lui tombera en poussière. L’histoire révélera son secret, la terre et la mer rendront les morts qui y étaient cachés. Ce sera la résurrection de la chair.

Ceux qui seront encore vivants sur terre à ce moment ne connaîtront pas la mort, mais, après le jugement de toute leur vie dans l’instant même de la venue du Seigneur, « ils revêtiront », par-dessus leur ancienne peau, la tenue nouvelle de la Résurrection (2 Co 5, 2-4).

Il y aura une forme de résurrection pour les damnés (Jn 5, 29 : une « résurrection de condamnation »), mais ce sera pour ce que l’Apocalypse appelle la « seconde mort » (20, 6.13 ; 21, 8).

III – Que sait-on des derniers temps ?

A. L’événement même du retour du Christ

Ce sera un événement repérable sur l’échelle du temps et pas seulement un horizon sans cesse reporté qui nous porterait toujours en avant, sinon le bonheur final n’existerait jamais, en tout cas il ne serait pas le rassemblement de tous les sauvés dans la Jérusalem céleste.

Cet événement dépend totalement de la volonté du Père (le Fils même veut en ignorer la date !, cf. Mc 13, 32), il ne se laisse déduire d’aucun calcul, il ne ressortit pas aux lois de l’histoire, il correspond au plenum (qualitatif plus que quantitatif) du dessein de Dieu sur l’humanité, dont nous n’avons absolument pas la mesure.

Il sera simultanément retour du Christ, Jugement dernier et résurrection générale, dans la mesure où le Christ, en venant achever l’histoire, mettra toute réalité à nu, bousculant le cours présent du temps et apportant l’ultime accomplissement au dessein de Dieu : la victoire définitive sur le péché et la mort. Ce résultat n’est possible qu’au prix d’un jugement, c’est-à-dire d’une totale mise en conformité de la création avec Dieu. « Puis ce sera la fin, quand il remettra le royaume à Dieu et au Père, après avoir anéanti toute principauté, toute puissance et toute force. Car il faut qu’il règne jusqu’à ce qu’il ait mis tous ses ennemis sous ses pieds. Le dernier ennemi qui sera détruit, c’est la mort. » (1 Co 15, 24-26)

Le monde de la résurrection n’est pas un autre monde, sans rapport avec ce monde-ci, sinon la victoire de Dieu sur le mal ne serait pas totale et la création matérielle serait laissée en arrière comme la fusée porteuse qui ne compte plus une fois le satellite sur orbite. Dieu créera « les cieux nouveaux et la terre nouvelle. » (Is 65, 17 ; 66, 22 ; 2 P 3, 13) Mais nous ne pouvons rien imaginer sur ce que sera cette terre et ses habitants non humains (vie animale, végétation ?).

La Résurrection ne s’opère pas sans reste, dans la mesure où le Diable et ses séides, même parqués dans « l’étang de feu » (Ap 19, 20 ; 20, 9.14.15 ; 21, 8), ne sont pas anéantis. Dieu lui-même ne gagne pas à tous les coups, son amour n’exerce pas une attraction irrésistible. Dieu sera « tout en tous » (1 Co 15, 28), mais on ne réécrit pas l’histoire, qui laisse sa marque !

B. L’histoire en train de se faire a-t-elle un sens ?

Le retour du Seigneur éclaire d’un jour décisif notre histoire présente.

D’abord il lui donne un prix  : loin d’attendre passivement la venue du Christ, nous avons à nous y préparer et nous savons que tout a son importance, puisque dans le jugement Dieu fera entrer en ligne compte tout ce que nous aurons vécu sur cette terre. Comme dit le concile Vatican II : « Certes, nous savons bien qu’il ne sert à rien à l’homme de gagner l’univers s’il vient à se perdre lui-même, mais l’attente de la nouvelle terre, loin d’affaiblir en nous le souci de cultiver cette terre, doit plutôt le réveiller : le corps de la nouvelle famille humaine y grandit, qui offre déjà quelque ébauche du siècle à venir. » (Gaudium et Spes, 39)

Il nous délivre aussi de toutes les illusions et des craintes nées de l’observation des lois immanentes au monde : que ce soit celles des astres (supposés avoir une influence sur nous), que ce soit celles de la nature ou de la politique : les menaces liées à l’écologie, à la santé, à la démographie, n’ont rien à voir avec la fin des temps, et Dieu s’est engagé après le déluge (Gn 8, 21-22) à ce que le cours de ce monde continue jusque-là sans entrave.

Il nous invite à lire , comme le dit Jésus, « les signes des temps » (Mt 16, 3) : non pas que nous puissions, au ras de l’histoire, repérer des lois qui mèneraient inéluctablement au terme (cf. le sens de l’histoire vu par les marxistes), non pas que nous trouvions dans des prophéties (fussent-ce celles de l’Apocalypse) la description anticipée de ce qui arrivera dans les derniers moments, mais le Seigneur nous a alertés sur le fait que le terme s’approche de nous par une suite de moments décisifs (kaïroï en grec), qui sont déjà une réalisation à échelle réduite du Jugement dernier. C’est pourquoi il peut dire : « Cette génération ne passera pas que tout cela ne soit accompli. » (Lc 21, 32) Il visait là probablement ce qui est « son Heure », le moment de sa passion et de sa résurrection, lorsque, dans son Corps, il a porté le jugement du monde, mais il désigne aussi ce qui est arrivé en l’an 70, quand l’aventure d’Israël s’est trouvée passée au crible, et où sur les ruines de l’ancien Temple s’est élevée la primitive Église, le nouveau Peuple de Dieu. Ces moments clefs se sont produits à tous les tournants de l’histoire de l’Église quand une réalité humaine riche et complexe a soudain été réduite à néant et passée au crible (qu’on pense à 1453, la chute de Constantinople, ou à 1789, la fin de monarchie de droit divin en France) ; mais c’est aussi l’histoire de nos vies, à l’heure de notre mort. Ces « jugements » (c’est le sens du mot « crise ») sont autant d’anticipations de l’Heure ultime.

On ne peut pas encourager une lecture millénariste des derniers temps. Un passage difficile de saint Jean (Ap 20, 2-7) a souvent été pris comme l’annonce d’un règne terrestre du Christ pendant mille ans, qui se déroulerait dans l’histoire avant l’ultime glorification. Les imaginations se sont souvent enflammées devant la perspective de cette « première résurrection » qui ne serait pas encore la dernière étape. Il est plus probable qu’il faut, avec saint Augustin, y voir le règne des justes déjà sauvés auprès du Christ, dans le ciel.

C. Qu’y aura-t-il après la Résurrection ? Quelle béatitude ?

C’est à juste titre que le Nouveau Testament recourt si peu à une présentation imaginative de la béatitude finale ; toute image risque de laisser croire à un objectif somme toute limité, comme le sont nos joies présentes : aucune d’entre elles n’est de nature à nous combler toujours, et ce n’est pas en les transposant dans une durée indéfinie, avec un coefficient très élevé d’intensité, qu’on les rendra plus satisfaisantes. Là où les descriptions de l’enfer chez Dante sont remplies de poésie et pleines de variété, la vision du paradis chez le même auteur est plutôt fade ! L’assurance que donne saint Paul que nous serons « toujours avec le Seigneur » (1 Th 4, 17) est peut-être la plus juste. Nous pouvons penser que lui sait comment nous rendre heureux, toujours.

Pourtant nous pouvons, sur la base des indications de l’Écriture, dire ceci :

Dieu au centre et Jésus avec lui

Le bonheur de l’homme est de voir Dieu et de le connaître comme nous en sommes connus. L’homme malgré ses limites est appelé à voir Dieu enfin et à y puiser la joie infinie pour laquelle il a été fait, celle d’entrer dans la vie des personnes divines, comme un fils très cher du Père, uni au Christ par les liens d’un amour à la fois fraternel et conjugal, et animé de l’Esprit qui est la vie même des deux autres Personnes. Jésus sera toujours nôtre avec son humanité qu’il ne quittera pas et qui nous sera commune. Les autres hommes, devenus eux aussi transparents à cet amour, nous renverront à l’infini l’image vivante de Dieu.

Corps et âme

Il ne s’agira pas d’un bonheur désincarné, nous serons toujours, dans la pensée de Dieu, à la fois corps et cœur, c’est ce corps qui nous mettra en contact avec les autres bienheureux et avec le cosmos transfiguré. Le corps, dégagé de ses pesanteurs, sera ainsi totalement au service de l’adoration et de la charité. Il aura gardé tous ses traits distinctifs, dégagés du masque que nous inflige le péché ; il aura intégré toutes les expériences fortes que l’homme a faites et qui l’ont rapproché de Dieu. L’homme sera ressuscité dans la plénitude de son âge (l’âge du Christ ?).

Personne et communauté

Dieu nous attend dans une cité : la nouvelle Jérusalem. Il a créé l’humanité comme un corps, comme une famille. Ayant atteint sa pleine stature, celle-ci n’aura plus à s’accroître, il n’y aura plus de naissance, comme il n’y aura plus de mort (Mt 22, 30). Toute la richesse de relations qui existait sur terre sera bien sûr sauvegardée et embellie par la béatitude. Les liens spécifiques que les êtres ont eus entre eux ne seront pas abolis, mais n’auront plus la même exclusivité, car beaucoup pourront rentrer dans l’intimité de notre cœur, sans que le nombre ne nuise à la qualité des relations. Comme il n’y aura plus de génération et que tout le monde sera contemporain, toutes les relations deviendront des liens de fraternité spirituelle.

Mouvement

L’éternité, malgré les apparences, n’est pas un état immobile, c’est une avancée sans fin : nous irons « de commencements en commencements jusqu’à des commencements qui n’auront pas de fin » (Grégoire de Nysse). Dieu étant infini, notre connaissance de lui, notre jouissance de lui, seront elles-mêmes sans fin, toujours rebondissantes.

CONCLUSION :

Notre thème est capital. Sans eschatologie le christianisme est une sagesse pour ce monde-ci, il ne se distingue plus des philosophies religieuses qui ont cherché à donner un sens à l’aventure de l’homme sur terre. En nous montrant que nous sommes en marche vers un accomplissement qui dépasse ce monde, l’attente des derniers temps agrandit la perspective et nous amène à voir notre monde comme un pressentiment d’une réalité plus haute qui le polarise et l’habite déjà secrètement.

Le problème du mal peut alors trouver une solution, sinon l’homme est obligé de choisir entre la résignation pour ne pas souffrir (stoïcisme, bouddhisme) et le rêve des lendemains qui chantent (marxisme), lequel se termine souvent en révolte stérile (anarchisme).

Mais il s’agit de montrer que toute cette histoire n’est pas un conte de fées, qu’elle est dans la continuité de ce que Dieu a déjà commencé et qu’il achèvera un jour.

Pistes pour les discussions

Création et salut :
Le monde actuel est-il éternel ?
Dieu peut-il être le Créateur sans être le Sauveur ?
Le mal a-t-il pris Dieu au dépourvu ?
Pourquoi dit-on de Jésus qu’il est l’Alpha et l’Oméga ?

Le retour du Christ et la Résurrection :
Pourquoi le retour du Christ s’accompagne-t-il d’un jugement ?
Le corps a-t-il sa place dans l’éternité ?
Le Ciel, est-ce que ce ne sera pas ennuyeux ?

Le regard sur notre histoire :
Pourquoi Jésus n’a-t-il pas voulu nous indiquer la date de son retour ?
L’histoire a-t-elle encore un sens depuis que Jésus est passé sur terre ? Y a-t-il un progrès ?
Pouvons-nous hâter le retour du Christ ?

Réalisation : spyrit.net