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La mission des anges

Paul-Victor Desarbres

À quoi peuvent bien servir les anges ? Le scepticisme de beaucoup concernant l’existence des créatures célestes se fonde, bien souvent, sur l’idée que l’on imagine parfois bien trop d’intermédiaires entre Dieu et l’homme. Voltaire – on ne s’en étonnera pas – rapportait dans son Dictionnaire philosophique les anges à un type de créatures messagères de la divinité, connues dans toutes les civilisations, que les Grecs auraient par exemple résumées dans le dieu Hermès. La preuve par les plumes. Mais on aura compris, à ces remarques caustiques, que ce qui gênait le vieillard de Ferney comme certains de nos contemporains, c’est l’idée de créatures entièrement spirituelles, dont tout homme n’éprouve pas immanquablement l’existence : « On ne sait pas précisément où les anges se tiennent, si c’est dans l’air, dans le vide, dans les planètes : Dieu n’a pas voulu que nous en fussions instruits. » raillait encore Voltaire. A contrario, l’existence des anges n’a pas cessé d’exercer, jusqu’à aujourd’hui une relative fascination, de Wim Wenders à tel ou tel recueil de poésie. Ce n’est peut-être là que la nostalgie d’un trait culturel, mais l’idée, quoique souvent mal formulée et rêveuse, d’êtres parfaits et bons n’est pas morte, loin de là.

L’intuition de l’existence d’un monde invisible (invisibilia, pour reprendre le terme employé dans le symbole de Nicée-Constantinople) et de créatures spirituelles n’est pourtant pas le refuge de croyances absurdes ; elle ne signifie pas que l’homme ait commerce avec un monde appelé à faire tourner les tables. Les anges, tels que les conçoit la théologie chrétienne ne sont pas tant l’objet d’une révélation que les acteurs d’une histoire, celle de la Révélation. Aussi leur existence est-elle une vérité de foi fondée sur l’Écriture et la Tradition vivante.

Avant de faire quelques remarques sur cette histoire telle qu’elle apparaît dans l’Écriture sainte, il convient de faire quelques remarques sur le mot et ses origines. « ange » en hébreu se dit malakh ; la racine de ce mot est laakh, c’est-à-dire mission ou service [1]. Les traducteurs grecs de la Bible choisirent de traduire ce mot par aggelos, mot couramment utilisé dans le sens de messager. Les Septante insistaient par là sur le principal rôle de ces serviteurs du Dieu unique et transcendant : parler aux hommes pour Dieu, leur délivrer un message en qualité de messagers sûrs, dignes d’une absolue confiance. Les anges, tels que la Bible nous les présente, sont des créatures avant tout au service de Dieu, et parfaitement à son service. A tel point que tel ou tel a pu dire que c’étaient de bien inutiles intermédiaires [2]. Mais la foi chrétienne ne connaît pas les êtres inutiles ; elle ne méprise pas les serviteurs. Il faut préciser que les anges ne se réduisent pas à une fonction, parce que Dieu n’a pas voulu des services mais des serviteurs. D’où cette affirmation que les anges se définissent par une fonction, mais qu’ils ont aussi un être, une existence propre : qu’ils sont aussi des esprits [3]. Les messages de Dieu et les expressions de sa sollicitude pour l’homme ne sont pas de simples objets. Dans l’histoire du salut, Dieu a adressé à l’homme non seulement des pensées, mais aussi des esprits chargés de les porter.

On entrevoit là l’importance de l’idée qu’exprime de façon quasi tautologique l’expression de mission des anges : le fait de servir (et d’être envoyé, car tel est le sens du mot mission) est au cœur non seulement d’une définition abstraite de ce que peut être un ange, mais aussi au centre d’une meilleure compréhension de la création. S’il y a des anges, c’est que l’homme n’en est pas, c’est qu’il y a une perfection dans le service de Dieu dont il n’est pas, malgré toute la valeur de son être. « L’homme n’est ni ange ni bête, et le malheur est que qui veut faire l’ange fait la bête » disait Pascal [4]. Autrement dit, la question des anges est non seulement une question de métaphysique, mais aussi d’attitude spirituelle ; elle amène à tempérer un certain anthropocentrisme.

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N’en déplaise à Voltaire et à son Dictionnaire, les anges-messagers semblent bien typiques de la foi d’Israël en un Dieu transcendant et unique, qui impliquait que Dieu et l’homme ne se vissent pas habituellement. S’il est vrai, ainsi que la tradition rabbinique le rapporte, que des noms d’anges auraient été pris à Babylone, leur fonction n’en est pas moins bien différente de cette origine [5].

On sent toute l’importance de cette distance qui doit être conservée entre l’homme et Dieu dans le livre de l’Exode (3, 2) où Moïse, avant d’être appelé directement par Yahvé, voit son attention attirée par l’Ange du Seigneur qui « lui apparut dans un buisson ardent. » On a pu dire que l’apparition de l’ange avait été ajoutée, mais alors que dire de celle du buisson ? Il n’est vraiment pas certain que l’ange ait fait l’objet d’un ajout. Il marque une étape dans la rencontre entre Moïse et Yahvé, et annonce celle-ci.

Quand Adam et Ève doivent quitter l’Éden, c’est un ange qui garde désormais l’entrée du paradis terrestre (Gn 3, 24). Ce sont encore les anges qui protègent Lot de la destruction de Sodome, lui qui avait reçu et protégé ces envoyés de Dieu de la haine des habitants de la ville (Gn 19 1-22). C’est un d’entre eux qui arrête la main d’Abraham au moment où il va sacrifier son fils Isaac (Gn 22, 11). Le peuple hébreu, Moïse en tête, est conduit par des anges au pays de Canaan (Ex 23, 20-23). Bien plus tard, Étienne, avant de subir le martyre, conclut ainsi sa harangue aux habitants de Jérusalem : « vous qui avez reçu la Loi par le ministère des anges et qui ne l’avez pas observée » (Ac 7, 53). Qu’il y ait là la référence à une tradition précise ou non, on comprendra que les anges sont associés à toute l’annonce du salut, y compris à la délivrance de la Loi. Les anges sont les messagers des grandes nouvelles, des naissances ainsi que des appels de Dieu, comme celui par lequel il consacre Isaïe en tant que prophète (Is 6, 6) [6]. Ils assistent les prophètes, comme Élie qui croit mourir de faim, après avoir fui dans le désert. Seule la prévenance de l’ange, qui par deux fois nourrit Élie, permet sa marche de quarante jours jusqu’à l’Horeb et la rencontre avec Yahvé (1R 19, 5-8).

Ce sont à chaque fois des interventions décisives et rassurantes que celles des anges, évitant des malheurs, annonçant des joies. Ils expriment la sollicitude de Dieu pour l’humanité dans toute sa pureté. Il faut souligner le fait que les anges sont également largement évoqués dans le Nouveau Testament, dans les Évangiles et ailleurs. L’Annonciation est un épisode particulièrement intéressant à cet égard, tant il illustre ce rôle essentiel des anges dans l’histoire du salut : la nouvelle que Marie de Nazareth portera le Fils de Dieu, accompagnée de toute la sollicitude rassurante et de toute la joie possibles, est portée par un ange : Gabriel. La signification du nom de l’ange n’est ici pas anodine ; Gabriel est d’ailleurs le seul ange, avec Raphaël et Michel à en porter [7]. Celui-ci signifie « force de Dieu ». Gabriel intervenait déjà dans le livre de Daniel pour expliquer à ce dernier la prophétie du retour d’Israël à son Dieu (Dn 9, 20-27). Dans l’évangile de l’Annonciation, l’ange explique encore ce qui se fera et comment cela se fera (Lc 1, 26-38). On prie encore à l’aide de cette salutation angélique, dont le premier mot est un appel à la joie [8]. C’est aussi la naissance de Jean-Baptiste qui est annoncée à Zacharie par un ange (1, 11) ; de même, Joseph recevra en songe l’instruction de prendre sa fiancée chez lui, quoiqu’elle attende un enfant qui n’est pas le sien (Mt 1, 20-22).

On comprend que, dans l’Évangile, les anges accompagnent le Christ, que l’Église appelle le « centre du monde angélique ». Ils veillent sur son enfance, ils l’assistent au désert (Mc 1, 12 et 4, 11). Ils manifesteront la gloire du Christ lors du Jugement dernier : « Quand le Fils de l’homme viendra dans sa gloire avec tous ses anges… » (Mt 25, 31). C’est d’ailleurs comme des anges que sont décrits les deux hommes qui annoncent aux saintes femmes que Jésus est ressuscité (Lc 24, 4-7) : Luc n’utilise pas ici le mot aggelos, sans doute pour ne pas forcer le témoignage, ou parce qu’il ne souhaite pas attirer l’attention sur autre chose que le message délivré, et fait en tout cas dans un notable souci d’authenticité [9].

Dans les Actes des Apôtres, l’Ascension, qui prend visiblement de court les disciples du Christ, reçoit une interprétation sous la forme d’une exhortation des anges. Deux « hommes vêtus de blanc » apparaissent et prennent la parole : « Hommes de Galilée, pourquoi restez-vous ainsi à regarder dans le ciel ? Ce Jésus qui, d’auprès de vous, a été enlevé au ciel viendra comme cela, de la même manière que vous l’avez vu s’en aller vers le ciel » (Ac 1, 11). Au moment où le Fils de l’homme n’est plus parmi nous une présence visible, mais une présence invisible, les anges annoncent déjà son retour, replaçant les disciples dans l’histoire du salut : celle-ci n’est pas finie, et si la présence du Christ est moins tangible, elle n’en est pas moins réelle jusqu’à ce qu’il revienne. Les anges, on le voit, sont étroitement associés au Fils.

Ces anges que l’on peut toujours considérer comme des prolongements directs de l’action de Dieu sont donc bien établis dans l’Écriture. L’Apocalypse nous montre cependant qu’il y a un monde ou plutôt une création entièrement spirituelle, qui s’inscrit en permanence dans l’histoire du salut. Le combat victorieux de l’archange Michel contre le démon (Ac 12, 7-12) y marque ainsi la prochaine fin des temps. Son nom signifie : « Qui est comme Dieu ? » Saint Michel illustre l’éclatante supériorité du Bien, inspiré par Dieu, sur le Mal. L’histoire du salut comporte donc les anges, auxiliaires de l’action divine. Dieu pourrait bien sûr être seul à intervenir, mais ce n’est pas le cas : pour des raisons anthropologiques qu’on a déjà évoquées et qui sont propres à l’histoire d’Israël et du nouvel Israël qu’est l’Église d’une part ; pour des raisons divines qu’on ne prétendra pas comprendre, qui constituent une partie du mystère de la création – mystère de la création d’un monde invisible [10].

Saint Thomas a cette expression fulgurante à propos de l’action des anges : illuminare, c’est-à-dire éclairer les intelligences et les cœurs, et les préparer à la compréhension des de Dieu : en cela, ils prolongent individuellement l’histoire du salut de l’humanité [11].

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Il faut ici évoquer un autre aspect de la tradition chrétienne, fondé sur les Écritures : ce sont les anges gardiens. Cela signifie que chaque âme se voit attribuer un ange qui reçoit de Dieu la mission de la protéger. Si sentir la protection de son ange gardien ou éprouver le besoin de s’y adresser ou non est une affaire de spiritualité personnelle, la signification profonde de cette affirmation est aisément perceptible : chacun de nous est le fruit d’une pensée de Dieu, ainsi que l’objet d’une attention permanente de sa part. L’idée d’ange gardien évoque, plutôt que celle d’un attaché à notre surveillance, celle d’un attachement profond et irréfrangible de Dieu à notre personne. Et la bienveillance spéciale de Dieu pour chaque homme est une protection [12]. Elle implique une conduite de sa vie [13]. Elle correspond également à l’idée que nous avons chacun une vocation singulière à être chrétien, baptisé [14]. On précisera que cette idée ne relève pas d’un quelconque folklore métaphysique, mais d’une affirmation du Christ (Mt 18, 10) : « Gardez-vous de mépriser aucun de ces petits : car, je vous le dis, leurs anges aux cieux voient constamment la face de mon Père qui est aux cieux. » Ces anges gardent les humbles. On notera que l’idée était déjà présente dans la tradition juive, même si elle s’en trouve élargie (Ps 34, 8) : « Il campe, l’ange de Yahvé, autour de ceux qui le craignent, et il les dégage. » L’ange est ainsi un instrument de la justice divine. On comprendra cette affirmation de Saint Augustin pour qui « toute chose visible en ce bas monde est confiée à un ange [15]. » Dieu ne laisse aucun homme à l’abandon.

C’est dans cette même perspective, doublée de la référence à l’Apocalypse, que la tradition a retenu Saint Michel comme protecteur contre le Malin. Le pape Léon XIII composa ainsi un exorcisme dont certains extraits furent retenus comme prières séparées :

Saint Michel Archange, défendez-nous dans le combat ; soyez notre secours contre la perfidie et les embûches du démon. Que Dieu exerce sur lui Son empire, nous le demandons en suppliant ; et vous, prince de la milice céleste, refoulez en enfer, par la Vertu divine, Satan et les autres esprits malins qui errent dans le monde pour la perte des âmes. Amen.

On se permettra une digression à ce propos. La fidélité absolue des anges, à la différence de Satan et des démons, aussi appelés anges du mal, est considérée comme le fruit d’un choix définitif de servir Dieu. Satan a ainsi décidé de façon irrévocable de ne pas obéir (Non serviam), entraînant ce que la Tradition nomme la chute des anges. Ces événements ne sont pas à penser dans notre perspective temporelle. La liberté des anges est ainsi, quoique différente, comparable à celle des hommes et peut en un sens lui servir dans l’absolu de modèle : on peut tendre vers ce choix définitif de créature purement spirituelle, cet abandon et cette joie. La contemplation de ces figures spirituelles n’est pas sans leçons, comme l’écrit saint Jean de la Croix :

Rappelez-vous combien il est vain, périlleux et funeste de se réjouir d’autre chose que du service de Dieu, et considérez quel malheur ce fut pour les anges de se réjouir et de se complaire dans leur beauté et leurs dons naturels, puisque c’est pour cela qu’ils tombèrent, privés de toute beauté, au fond des abîmes. [16]

Mais l’homme n’est pas ange, et n’a pas le même destin. L’exemple qui l’anime est celui de la sainteté, et non celui de l’« angélisme. » On en voudra pour preuve la promesse de la résurrection qui implique notre survie non seulement spirituelle, mais aussi, sous une forme renouvelée, corporelle.

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Qu’il soit cependant permis de parler de ce qui a inspiré tant d’hommes dans la façon dont ils voulurent s’adresser à Dieu. Car anges et louange ne sont pas sans parenté, et les visions que nous offre l’Écriture des chœurs d’anges chantant font mieux comprendre la place qu’on donne aux anges dans la liturgie. Ceux-ci ne sont pas seulement des intermédiaires, mais des figures inspiratrices, en tant que modèles du culte qu’on rend à Dieu. « La gloire de Dieu resplendit dans les anges [17]. »

Le fait existait déjà dans le judaïsme. La prière Shalom alékhem, prononcée le soir du shabat, est adressée aux deux anges qu’une tradition juive assigne à tout homme. Plus tard, après le Christ, divers chants (piyyoutim) ont donné encore de l’importance à l’image des anges siégeant dans la cour céleste, en s’inspirant des psaumes (Ps 137, 3 : « Je te chante en présence des anges »).

La liturgie chrétienne est ainsi associée à la louange des anges, comme ceux-ci sont voués au Christ. Le Gloria que l’on chante dans la messe est ainsi inspiré de l’exultation des anges (Lc 2, 14). On pense aussi à l’hymne du début de la veillée pascale, l’Exultet [18]. Il n’est pas jusqu’au Sanctus qui ne proclame Dieu trois fois saint en faisant référence à une acclamation angélique : « Saint, saint, saint est Yahvé Sabaot, sa gloire emplit toute la terre ! » (Is 6, 3). Dans la fin de la Préface commune précédant le Sanctus, il est fait allusion aux anges (et même, selon le choix de la formule, aux archanges, aux Trônes et aux Dominations qui sont des chœurs d’anges nommés par la tradition).

Dans le Canon romain, après la consécration, on demande à l’ange du Seigneur de lui porter l’offrande ainsi présentée :

Nous t’en supplions, Dieu tout-puissant, qu’elle soit portée par ton Ange en présence de ta gloire sur ton autel céleste […]

La demande est au fond la suivante : anticiper la liturgie du ciel, comme en avant-goût. Ainsi le Corps du Christ est-il parfois nommé panis angelorum, le pain des anges.

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On le voit, les anges ne sont pas des créatures dotées de super-pouvoirs destinées à nous procurer des places de parking [19] … Ils sont les envoyés de la bonté de Dieu, que tout homme ne connaîtra certes pas avec la même intensité. Ce sont les compagnons d’une vie droite et chrétienne. Leur figure nous inspire, notamment pour louer Dieu. Nous n’en sommes pas ; notre tâche est de devenir saints. Mais ils nous rappellent ce que nous ne sommes pas, ce que le monde spirituel et le ciel sont. En cela, ils participent pleinement de la Rédemption opérée par l’Incarnation, la Passion et la Résurrection du Christ. Leur tâche est ainsi d’être à la fois anges de Dieu et « anges des hommes [20] » ; ils sont au cœur de la véritable et unique Ascension, celle du Christ que nous ne pouvons imiter qu’en nous conformant à lui le plus étroitement – sans angélisme, mais en compagnie des anges.

Paul-Victor Desarbres, Paul-Victor Desarbres, né en 1985, est actuellement élève à l’ENS (Ulm) et titulaire d’un mastère en Lettres classiques.

[1] Il va sans dire que tout malakh, dans la Bible n’est pas un ange (par ex. 1 S 11, 7), même si le mot a fini par être employé dans ce contexte spécifiquement.

[2] Certains rabbins ont parfois considéré que des anges avaient pu être « ajoutés » dans certains épisodes de la Torah où l’échange de paroles direct entre Dieu et l’homme aurait choqué a posteriori par sa hardiesse. Mais cela ne peut valoir partout.

[3] Cf. Saint Augustin, Enarratio in Psalmum 103, 1, 15 : « Ange désigne la fonction, et non la nature. Tu demandes comment se nomme cette nature ? – Esprit. Tu demandes la fonction ? – Ange ; d’après ce qu’il est, c’est un esprit, d’après ce qu’il fait, c’est un ange. »

[4] Pensées, Lafuma 678.

[5] Voir le Talmud de Jérusalem, Roch ha-chanah 1, 2 et le Dictionnaire encyclopédique du Judaïsme, Paris, Cerf, 1993, art. « Ange ».

[6] « L’un des séraphins vola vers moi, tenant dans sa main une braise qu’il avait prise avec des pinces sur l’autel. Il m’en toucha les lèvres et dit : ‘Voici, ceci a touché tes lèvres, ta faute est effacée, ton péché est pardonné’ ». L’ange remplit ici clairement une fonction divine. Mais cela ne signifie pas qu’il soit superflu.

[7] Dans l’histoire, d’autres noms d’anges sont apparus (Uriel etc...), mais l’Eglise a demandé qu’on ne rende un culte qu’à ceux dont le nom figure dans la Sainte Ecriture. Voir le Directoire pour la piété populaire et la liturgie, 2002, n°215.

[8] Le Chaire grec est une formule de salutation très courante, mais le contexte biblique permet de comprendre également le sens propre : « Réjouis-toi ».

[9] Il aurait d’ailleurs été sans doute plus « vendeur » d’insister, et d’en rajouter dans ce récit : la résurrection et son annonce manquent étrangement de dimension spectaculaire chez les évangélistes, dont les récits sont assez concordants. La simplicité avec laquelle ils traitent l’épisode plaide pour sa véracité.

[10] On comprendra le besoin de hiérarchiser cette cour céleste qu’éprouvèrent de nombreux croyants. Denys l’Aréopagite, prolongeant certaines intuitions des Pères Cappadociens, fonde la distinction des neuf chœurs des anges sur la triade : purgation/illumination/union, différemment réfractée au niveau de chaque plan angélique (Hiérarchie céleste). Saint Grégoire le Grand parle aussi des neuf chœurs des anges ; Saint Thomas, dans sa quæstio CVIII art. 2 de la Somme (pars prima) reprend l’idée. Mais la piété populaire en a longtemps retenu sept, de même que certaines traditions orientales. On notera qu’il existait déjà à ce propos des traditions hébraïques. On en retiendra l’idée que le monde spirituel n’est pas dans l’absurde.

[11] Somme, Pars prima, quæstio CXI.

[12] On lit à ce propos dans le Directoire pour la piété populaire et la liturgie de 2002, n° 216 : « La piété populaire a contribué, d’une manière particulière, au développement de la dévotion envers l’ange gardien. Saint Basile le Grand (†379) enseignait déjà que "chaque fidèle a, près de lui, un ange qui le protège et le conduit sur le chemin qui mène à la vie éternelle". Cette doctrine vénérable s’est peu à peu consolidée […] jusqu’à l’œuvre de saint Bernard de Clairvaux (†1153), qui est considéré comme le grand docteur et l’apôtre éminent de la dévotion envers les anges gardiens.

[13] Cf. ibid. : « La dévotion envers les anges gardiens suscite aussi un style de vie qui est caractérisé par : l’action de grâces adressée à Dieu, qui accepte de placer des esprits d’une si grande sainteté et dignité au service des hommes ; une attitude de droiture et de piété, suscitée par la conscience de vivre constamment en présence des saints anges ; une confiance sereine dans les situations difficiles, inspirée par la conviction que le Seigneur guide et assiste le fidèle sur le chemin de la justice, en recourant en particulier au ministère des anges. »

[14] C’est ce que l’on appelle la vocation universelle. La tradition a parfois même reconnu deux anges gardiens aux personnes consacrées ; cela rejoint l’idée qu’il y a deux types de vocations, l’une universelle, l’autre particulière et prophétique.

[15] Huit questions. Les anges.

[16] Avis et maximes, « Autres avis et maximes », chap. VII : Des Anges dans Œuvres spirituelles, Paris, Le Seuil, 1947.

[17] Préface de la messe votive pour la fête des saints anges.

[18] « Qu’exulte dans le ciel la joie des anges… »

[19] Cf. Directoire pour la piété populaire et la liturgie, 2002, n° 217 : le texte souligne le bienfait que constituent les expressions de la piété populaire envers les saints anges et met en garde contre quelques déviations : « Certains fidèles peuvent être tentés de considérer les événements de la vie quotidienne d’une manière schématique et simpliste, voire infantile, en rendant le Malin responsable de leurs difficultés, y compris les plus minimes, et, au contraire, en attribuant à l’ange gardien leurs succès et leurs réalisations positives ; or, de telles interprétations n’ont aucun rapport, ou si peu, avec le véritable progrès spirituel de la personne qui consiste à rejoindre le Christ. »

[20] Bossuet, Sermons pour la fête des saints Anges gardiens : « Je vous dis, en vérité, vous verrez les cieux ouverts, et les anges de Dieu montant et descendant. Paroles du Fils de Dieu à Nathanaël (Jn 1, 52). D’où vient que les cieux sont ouverts ? Et que veulent dire ces anges qui montent et qui descendent d’un vol si léger, de la terre au ciel, du ciel à la terre ? […] Ils descendent de Dieu aux hommes, ils remontent des hommes à Dieu. Ils sont les ambassadeurs de Dieu vers les hommes ; ils sont les ambassadeurs des hommes vers Dieu. Quelle merveille ! nous dit saint Bernard. Chrétiens, le pourriez-vous croire ? Ils ne sont pas seulement les anges de Dieu, mais encore les anges des hommes. »

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