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Vie et spiritualité des Églises orthodoxes orientales (Christine Chaillot)

Paris, Cerf, 2011, 467pp.
Jean Lédion

Cet ouvrage n’est pas un traité de spiritualité, ni un livre d’histoire. Il s’agit plutôt d’une vaste enquête sur ce que sont les Églises orientales peu connues qui se sont développées, dès les origines du christianisme, de la Syrie à l’Inde, mais aussi de l’Égypte jusqu’à l’Éthiopie et l’Érythrée. Ces Églises, séparées depuis le Ve siècle, ne sont pas pour la plupart en communion avec l’Église catholique, ni avec le Patriarcat œcuménique de Constantinople, malgré le titre d’« orthodoxes » qu’on leur décerne. A cela il faut aussi ajouter l’Arménie, où les chrétiens sont sans doute plus nombreux dans la diaspora que dans l’État arménien actuel. L’auteur, qui a publié de nombreux livres sur ces différentes Églises, a repris ses études antérieures dans cet ouvrage de synthèse. Elle y a joint également une importante bibliographie (presque cinquante pages). Cependant, il ne faut pas croire que l’ouvrage soit simplement une compilation livresque, car l’auteur, qui appartient lui à l’Église grecque orthodoxe (patriarcat de Constantinople), a effectué de nombreuses visites dans les dites Églises mais aussi dans des monastères, situés parfois dans des lieux très reculés, comme en Éthiopie. D’où le caractère vivant du récit, qui se rapproche quelquefois du compte-rendu du journalisme.

Le lecteur sera évidemment plutôt intéressé par telle ou telle Église, en fonction de ses connaissances ou de ses affinités personnelles. Mais il serait dommage de sauter une partie du livre pour cette raison, car chaque Église laisse d’autant mieux apparaître son originalité qu’on la situe davantage par rapport au panorama général. Néanmoins, les renseignements fournis sur les Églises éthiopiennes et indiennes sont très précieux, étant donné le peu de place qu’elles occupent dans la culture française.

Chaque partie, consacrée à une Église, examine la situation historique, la démographie dans le pays et également dans la diaspora. Trois chapitres sont systématiquement consacrés à la spiritualité, à la vie liturgique et à la vie monastique. Les anciennes Églises orientales, comme l’Église orthodoxe grecque, font une place très importante au monachisme, car c’est parmi les moines que l’on choisit les évêques. La vitalité de l’Église dépend donc fortement de la qualité de la vie monastique. On peut donc se réjouir de voir, dans le chapitre consacré à la vie monastique de l’Église copte égyptienne, que le monachisme, né dans ce pays au IVe siècle, est encore très vivant et réadapté à l’époque moderne – au sein d’un État peu favorable au christianisme. De même, la persistance d’une vie monastique restée proche des origines, peut-être un peu fossilisée, est une caractéristique du christianisme éthiopien qui a pourtant été victime de diverses persécutions et d’un isolement du reste du monde chrétien dans des périodes souvent très longues.

Ainsi, à travers le survol de ces communautés chrétiennes, on peut déceler, derrière les éléments de cette enquête, des foyers de sainteté, des signes de renouveau dans tous ces pays où la vie chrétienne est difficile voire menacée par l’hostilité de populations de religion différente. Ceci devrait normalement contribuer à montrer que la vie chrétienne n’est pas liée au mode de vie du monde occidental, monde qui s’emploie lui à oublier ses racines chrétiennes…qui pourtant ont fait ce qu’il a pu devenir.

Jean Lédion, marié, trois enfants. Diplôme d’ingénieur, docteur d’État ès Sciences Physiques. Enseignant dans une école d’ingénieurs à Paris.

Réalisation : spyrit.net