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Actualité de Jean Daniélou

Actes du colloque de l’Institut de France, 19 mai 2005, éd. J. Fontaine, Paris, Cerf, 2006.
Matthieu Cassin

Organisé pour l’anniversaire du centenaire de la naissance de Jean Daniélou, ce colloque a réuni principalement des témoins directs des activités du Cardinal Daniélou, et quelques autres. Il s’est tenu sous les auspices de l’Institut, puisque Jean Daniélou était entré à l’Académie française en 1972, deux ans avant sa mort. Les contributions réunies sont assez diverses, mais peuvent cependant se ranger sous deux chapitres principaux : celles qui ont trait directement et principalement à l’œuvre scientifique et théologique de Jean Daniélou, et celles qui reviennent sur des aspects de son activité pastorale et éducative.

Il ne faudrait pas trop séparer les deux, cependant : ce recueil met particulièrement en évidence combien Jean Daniélou fut un homme du contact et de l’enseignement, plus que du livre. Il a écrit, bien sûr, et beaucoup ; cependant, sa force, sa chaleur et sa vigueur étaient à leur meilleur pour transmettre, faire vivre et revivre pour l’auditoire. Jacques Briend, dans la brève communication qu’il consacre au décanat de Jean Daniélou à la faculté de théologie de l’Institut catholique de Paris, souligne qu’il était homme de la parole et de l’action, jusqu’à en être brouillon, jusqu’à laisser aux autres bien du travail pour rendre effectives les idées qu’il avait lancées et développées. Le Père Joseph Paramelle le caractérise comme « un génie plus intuitif que méthodique » ; ses livres en sont souvent l’exemple, fourmillants d’idées, mais aussi de références erronées ou approximatives. Marie-Joseph Rondeau, qui consacre depuis longtemps beaucoup de temps à la Société des amis du cardinal Daniélou, rappelle cependant à juste titre qu’il était aussi « l’homme des travers voyants et des vertus profondes »…

L’ensemble de ces actes permet de bien comprendre la place de Jean Daniélou dans la théologie du second XXe siècle : il a produit moins une théologie constituée et systématique, comme cela a pu être le cas, au moins pour partie, d’Henri de Lubac ou d’Hans Urs von Balthasar, que suscité un éveil intellectuel et spirituel. S’il a un temps été mis à mal, par des dominicains, mais aussi par ses confrères jésuites, sous l’accusation de tenir pour une ‘nouvelle théologie’, son rôle dans le renouvellement du travail théologique en particulier par le travail de redécouverte des Pères de l’Église, est bien mis en valeur dans les différentes contributions. Parmi ses options et propositions théologiques, son attention à la question de la coexistence actuelle du christianisme et des autres religions et sa théologie de l’accomplissement sont particuliè-rement étudiées. Son rôle au concile Vatican II, où il fut expert, est aussi assez largement évoqué.

L’ouvrage présente donc un tableau assez complet de l’homme, de son œuvre, acquis et failles, et malgré le ton laudatif, de rigueur en ces circonstances, on discerne assez bien comment son œuvre peut encore porter du fruit, malgré les limites de l’homme. En particulier, l’accent porté sur la richesse et la vigueur de son enseignement, parfois au détriment de la rigueur des détails, permet de mieux apprécier l’œuvre entière. Une invitation, donc, à lire et relire, avec une attention aiguisée pour mieux discerner forces et faiblesses de cette grande figure de la théologie française.

Matthieu Cassin, Né en 1980, élève de l’Ecole Normale Supérieure.
http://matthieu.cassin.org

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