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Aux origines de l’idée de Big Bang

R.H.

Jusqu’en 1918, la plupart des astronomes pensent que l’univers est limité aux dimensions de notre galaxie (Voie Lactée). À partir de cette date, on découvre d’autres galaxies, et des mesures de distances et de vitesses (Hubble, Slipher, Humason, Leawitt, etc.) révèlent que les galaxies lointaines nous fuient plus ou moins vite.

Cette observation provient de l’analyse de la lumière des galaxies par leur spectre : elles montrent un décalage vers le rouge (à l’opposé du violet dans l’arc-en-ciel qui est la décomposition de la lumière blanche au repos) qui indique un mouvement d’éloignement. La vitesse d’éloignement constatée est d’autant plus importante que la galaxie est éloignée de nous. Edwin Hubble formalise cette loi en 1929.

Mais personne ne trouva au début une explication à cette « récession des galaxies ». Du point de vue théorique, Einstein, grâce à la relativité générale (1913-1915), avait montré comment on peut décrire l’univers à grande échelle. Alexander Friedmann, un mathématicien russe, découvre en 1922 et 1924, des modèles relativistes qui correspondent à des univers en expansion et en contraction. Mais Einstein les refuse, préférant un univers sphérique et statique tel qu’il l’a découvert en 1917, probablement en raison de sa conviction (spinoziste) que l’univers (la « Substance ») ne peut avoir d’histoire. La plupart des physiciens suivirent la position d’Einstein jusqu’au début des années trente.

Georges Lemaître, qui avait étudié la relativité générale en Belgique entre 1920 et 1923 (grâce à la permission du cardinal Mercier, durant son séjour au séminaire de Malines) et à Cambridge (Royaume-Uni) avec Eddington en 1923-1924, retrouve, de manière indépendante, les modèles d’univers de Friedmann (on les appelle aujourd’hui univers de Friedmann-Lemaître). De plus, il a la chance d’arriver au Harvard College Observatory en 1924-1925, au bon moment. Il y devient un astronome professionnel et y récolte, ainsi que dans les grands observatoires des États-Unis, qu’il visite en 1925, les données les plus précises sur la « récession des galaxies ». Son originalité est alors de songer à faire la jonction entre ces données et la relativité générale.

En 1927, de retour en Belgique, il montre que cette « récession » peut s’expliquer si l’on suppose que l’univers est en expansion ; l’univers, « en gonflant », écarte les galaxies qui demeurent fixes par rapport à lui. Par calcul, il retrouve exactement la loi de Hubble, que nous appelons depuis 2018 (par décision de l’Union astronomique internationale) la loi de Hubble-Lemaître. En 1931, réfléchissant sur ce qui se passe lorsqu’on remonte l’histoire d’un univers en expansion, il introduit l’idée d’un commencement physique (« naturel ») de l’univers. Einstein finit par accepter l’idée d’un univers en expansion, mais refusa toujours celle de son « commencement naturel ». Lemaître fit aussi le premier l’hypothèse de l’existence d’un rayonnement fossile témoin des premiers moments de l’histoire cosmologique. En 1964, un an avant sa mort, il eut la joie d’apprendre que celui-ci existe bel et bien grâce à la découverte du rayonnement cosmologique de fond par Arno Penzias et Robert Wilson.

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