Rechercher

Encart : "Ne vous refusez pas l’un à l’autre"

J.M.

« NE VOUS REFUSEZ PAS L’UN À L’AUTRE »

L’enseignement de saint Paul sur le mariage est toujours à redécouvrir. Tout en déconseillant le mariage à ceux qui peuvent s’en passer, l’apôtre formule à l’égard des conjoints le commandement suivant, très clair :

La femme ne dispose pas de son corps, mais le mari. Pareillement le mari ne dispose pas de son corps mais la femme. Ne vous refusez pas l’un à l’autre, si ce n’est d’un commun accord, pour un temps, afin de vaquer à la prière, de peur que Satan n’en profite pour vous tenter. (I Co 7, 4-5)

« Ne vous refusez pas l’un l’autre » : ce précepte a un fondement théologique essentiel : « L’homme et la femme deviennent une seule chair » (Gn 2, 24) rappelé à plusieurs reprises dans le Nouveau Testament : Mt 19, 5-6 ; 1 Co 6, 16 ; Ep, 5, 31. Un fondement exalté à l’extrême par saint Paul quand il identifie la relation de l’homme et de la femme à celle du Christ et de l’Église : « Maris, aimez vos femmes comme le Christ a aimé l’Église : il s’est livré pour elle » (Ép 5, 25) ; « Ce mystère est grand ; je veux dire qu’il s’applique au Christ et à l’Église » (Ép 5, 32).

Mais le précepte a aussi des prolongements pratiques dont il faut bien dire qu’ils sont de plus en plus étrangers à la mentalité contemporaine : le droit pour chacun des conjoints (ou des partenaires) de se refuser est en passe de devenir « inviolable et sacré ». Il alimente de plus en plus la chronique judiciaire aux États-Unis. Le désir simultané des deux conjoints étant forcément beaucoup plus rare que celui d’un seul, il en résulte, dans un monde qui voue par ailleurs un culte à la sexualité, un appauvrissement des relations conjugales dont les professionnels de la famille savent qu’il est une des principales causes du divorce. Le partenaire frustré, surtout si c’est la femme, pourra en outre être tenté par un surinvestissement sur l’enfant, aux conséquences psychologiques et morales souvent dramatiques.

Trop souvent l’Église a abordé la question de la sexualité dans le seul souci de son rapport à la fécondité, un sujet sur lequel il n’y a pas lieu de remettre en cause la doctrine classique. On a aussi beaucoup discuté de la valeur du plaisir, tenu depuis saint Thomas d’Aquin pour positif pour peu que la finalité première de l’acte sexuel, qui est la fécondité, ne soit pas entravée. Mais son rôle essentiel dans la consolidation du lien conjugal semble largement ignoré. Que l’eros entraîne avec lui la philia (l’amitié), et même l’agapè (la charité) est pourtant une réalité anthropologique avérée. Elle explique que beaucoup de mariages arrangés d’antan se soient, malgré tout, passés très bien, mais a contrario que, de nos jours, les relations sexuelles prématurées créent un sentiment amoureux là où l’accord des caractères n’est pas réalisé, fragilisant le mariage, si mariage il y a.

Sans doute le temps n’est plus où, comme il arrivait, dit-on, au XIXe siècle, le chapitre XXXIX de l’Introduction à la vie dévote de saint François de Sales, jugé trop suggestif ou trop permissif, était censuré. Il reste que ce texte, à l’instar de ceux de saint Paul, peut encore éclairer ceux qui s’attachent à combattre la crise du mariage.

J.M.
Réalisation : spyrit.net