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Enseigner le christianisme

Saint Augustin

Notre orateur, quand il dit des choses justes, saintes et bonnes (il ne doit pas en effet en dire d’autres), fait en sorte, dans la mesure de ses moyens, lorsqu’il les dit, d’être compris et écouté avec bonne volonté et soumission. Et s’il l’a pu et dans la mesure où il l’a pu, il n’a pas à douter qu’il le doit plus à la piété de ses prières qu’à ses capacités oratoires et qu’en priant pour lui et pour ceux à qui il s’adresse il est homme de prière avant d’être homme de discours. Quand vient l’heure de parler, avant de mettre en mouvement sa langue d’orateur, qu’il élève vers Dieu son âme assoiffée et recrache ce qu’il a bu ou déverse ce dont il s’est empli. Comme en effet, pour chaque chose à traiter selon la foi et l’amour, il y a bien des choses à dire et, pour qui les connaît, bien des manières de le dire, qui saura ce qu’il nous revient alors, à nous de dire, et à notre public d’entendre, si ce n’est celui qui voit les cœurs de chacun ? Et qui fait que nous disions ce qu’il faut et comme il le faut, si ce n’est celui « dans les mains de qui nous sommes, nous et nos discours » (Sg 7,16) ?

Qu’il apprenne donc tout ce qu’il faut enseigner, celui qui veut savoir et enseigner, et qu’il assimile, comme il convient à un homme d’Eglise, l’art de la parole ; mais, à l’heure du discours proprement dit, qu’il pense qu’à un esprit sain s’applique plutôt cette parole du Seigneur : « Ne pensez pas à ce que vous allez dire et à comment vous allez parler : ce que vous avez à dire vous sera donné à l’heure de parler ; ce n’est pas vous, en effet, qui parlez mais l’esprit du Père, qui parle en vous » (Mt 10,19-20). Si l’Esprit Saint parle donc en ceux qui, pour le Christ, ont été livrés à leurs persécuteurs, pourquoi ne le ferait-il pas en ceux qui livrent le Christ à ceux qui les écoutent ?



Augustin, Enseigner le christianisme (De Doctrina christiana), IV, XV, 32, traduction J.-Y. Boriaud, dans Saint Augustin, Œuvres III, Philosophie, catéchèse, polémique, Gallimard Bibliothèque de la Pléiade, Paris 2002, p. 129-130.

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