Le catéchisme et la théologie : rivalité ou complémentarité ?
Allez dans le monde entier. Proclamez la Bonne Nouvelle à toute la création. Celui qui croira et sera baptisé sera sauvé ; celui qui refusera de croire sera condamné. (Mc 16, 15-16)
Ils étaient fidèles à écouter l’enseignement des Apôtres et à vivre en communion fraternelle, à rompre le pain et à participer aux prières. (Ac 2, 42)
La théologie est la science des choses de Dieu. Elle s’adresse à ceux qui ont déjà accepté l’enseignement de l’Église et cherchent à mieux comprendre ce qu’ils croient. Elle s’efforce de relier ensemble les vérités de la foi et d’en montrer l’intelligibilité profonde, en s’appuyant sur les sources de la Révélation (Écritures, Pères de l’Église, docteurs, conciles, et autres documents du Magistère). Le catéchisme, lui « désigne un exposé synthétique, rassemblant de façon organisée les vérités de la foi chrétienne [1] », à l’usage de ceux qui n’ont pas encore accédé à une assimilation personnelle de la foi.
Le temps des découvertes
La réflexion sur le mystère chrétien a débuté dès la proclamation du kérygme (le cœur de la foi). Les discours des Actes des Apôtres, les lettres de saint Paul, celles de saint Jean et de saint Pierre, nous en donnent la matière et le témoignage.
Puis vint la période patristique, avec tout d’abord les Apologies, montrant que la foi chrétienne est raisonnable, cohérente, bien que méconnue et incomprise par ses adversaires. Suivirent les écrits dirigés contre les hérésies, qui n’ont pas tardé à se lever, donnant du mystère chrétien une interprétation qui en faussait l’axe. Dans ce genre de réfutation, un des premiers auteurs et le plus célèbre fut saint Irénée de Lyon (IIe siècle). Mais à côté de cela figuraient des écrits plus catéchétiques, notamment ceux qui permettaient de préparer les catéchumènes au saint baptême.
Se multiplièrent aussi les homélies et commentaires scripturaires. Bon nombre de ces textes nous sont parvenus, qui nous permettent de découvrir la splendeur de la doctrine des Pères, pensons, entre autres, aux prédications d’Origène. Enfin, dans le genre de la synthèse, il faut signaler le travail de saint Jean de Damas (VIIe siècle) auquel on doit une présentation de la foi chrétienne en cent chapitres (De la Foi orthodoxe).
La théologie ne s’élaborait pas alors en vase clos, elle émanait d’hommes qui étaient, pour la plupart, des pasteurs – et donc soucieux de la foi de leur peuple. Ce sont eux qui se réunissaient en concile pour préciser le dogme face aux grandes hérésies. Leurs définitions sont des garde-fous pour préserver le dépôt confié à l’Église des gauchissements qui le menacent mais, à chaque fois, la nécessité de préciser les contours de la vérité amène à élaborer un vocabulaire plus technique, qui n’est pas celui de l’Écriture (consubstantiel, personne, nature, etc.), mais qui reste encore limité.
De plus, un bon nombre de Pères étaient des moines, et comme tels soucieux de lire l’Écriture comme le livre des merveilles de Dieu, où on apprend à prier et à contempler. Leur théologie n’était pas scolaire, elle se voulait louange et entraînement dans l’amour de Dieu.
Il n’y avait donc pas jusque-là d’opposition bien tranchée entre théologie et catéchèse. À ceux qui arrivaient dans l’Église, on donnait sans doute un entraînement progressif, mais on leur dispensait assez vite la pure sève de la Parole de Dieu.
Le temps des précisions
Avec la fin de l’antiquité et le haut Moyen Âge, les préoccupations morales allaient souvent prendre le dessus, et la prédication se faire plus simple, plus pratique. On vit intervenir des prédicateurs de renom, comme saint Césaire d’Arles, qui, bien que moine à Lérins, comprit que son peuple avait besoin de doctrine, mais aussi de consignes fermes. Saint Antoine de Padoue en sera le lointain successeur. Sa dernière mission consista à prêcher le carême de l’an 1231, dans les environs de Padoue. Il commença ses enseignements dans une église, qui se révéla tout de suite bien trop étroite, et, comme aucun bâtiment ne pouvait contenir la foule qui se pressait autour de lui, grandissant chaque jour, il finit dans une prairie où il haranguait les fidèles suscitant de nombreuses conversions. Il mourut d’épuisement à la fin du carême. Dans ces prédicateurs se maintint la flamme qui animait les Pères quand ils commentaient pour leurs fidèles les Écritures. N’appelle-t-on pas Antoine de Padoue le « docteur évangélique » ?
Néanmoins, une évolution irrésistible poussa les maîtres, dans la seconde moitié du Moyen Âge, à faire une place de plus en plus grande à la dialectique, si bien que les études théologiques prirent une forme universitaire, supposant la spécialisation des disciplines, l’adoption d’une procédure de démonstration par syllogisme et l’acquisition d’un vocabulaire technique toujours plus précis, pour sérier les notions. Le genre le plus en vogue devint la quæstio, c’est-à-dire l’étude pointue d’un problème posé, avec une réponse par oui et par non. Les quæstiones se regroupèrent en « sommes » (comme celles de saint Thomas d’Aquin), dans l’intention de balayer tous les articles de la foi chrétienne, dogme, morale et sacrements, mais surtout de donner une architecture à cet exposé. Ce qu’on gagnait ainsi en rigueur, on le perdait parfois en largeur de vue, sans parler du danger de s’éloigner des préoccupations des simples fidèles.
Ceux-ci ne furent pas laissés totalement à l’abandon. Outre les prédicateurs dont on a parlé (avec saint Dominique, la prédication devint l’objet d’un ordre tout entier), les livres et surtout les images jouèrent un grand rôle. Les livres étaient rares, recopiés à la main dans les monastères, et seuls ceux qui étaient fortunés pouvaient s’en procurer. La foi des bâtisseurs se tourna vers la matière, la pierre et le verre, pour exposer dans les chefs-d’œuvre que nous connaissons, nos bien-aimées cathédrales, les vérités de la foi, l’histoire sainte, le déroulement du plan divin, la vie des saints, et constituer ainsi un patrimoine qui parle au cœur et aux yeux des fidèles. Ces écrins unissaient en leur sein plusieurs fonctions : cadre pour la liturgie, support pour l’enseignement de la foi, lieu de la prière silencieuse.
C’est dans la liturgie, culte officiel de l’Église, qu’est célébré le mystère du Christ, en particulier son mystère pascal. « Elle est le sommet vers lequel tend l’action de l’Église, et en même temps la source d’où découle toute sa vigueur [3]. » « Quand nous célébrons la liturgie, nous sommes entraînés dans l’amour de Dieu, nous sommes guéris et transformés [4]. » Les fidèles ne manquèrent jamais de cette nourriture. Mais, à cause de la multiplication des dévotions périphériques, de l’usage exclusif du latin dans les prières, de l’absence d’homélie expliquant les textes, ils n’en profitèrent pas autant qu’il aurait été souhaitable. Ce qui amena les Réformateurs (mais avant eux beaucoup d’esprits soucieux de l’instruction des fidèles) à dénoncer l’ignorance religieuse dont faisait preuve une bonne part du peuple chrétien. Dans bien des cas, des pratiques plus ou moins superstitieuses tenaient lieu de foi et de piété.
Le temps des certitudes
Martin Luther voulut, parmi les premiers, s’atteler à la tâche et fournir aux croyants une base sérieuse pour leur permettre de connaître leur foi. En 1529, il pourvut à la publication d’un Grand Catéchisme, pour les gens cultivés, et d’un Petit Catéchisme, pour les gens simples, qu’il a rédigés. Écrits dans un allemand accessible à tous, publiés grâce aux facilités que donnait depuis quelques décennies l’imprimerie, ils connurent de suite un grand succès. Ceux-ci furent suivis du Catéchisme de Heidelberg pour les réformés (1538) et d’une multitude d’opuscules et livrets, qui propagèrent les nouveaux enseignements de la Réforme.
L’Église catholique, comprenant qu’il ne fallait pas rester en arrière dans une œuvre si salutaire, encouragea les membres de la toute jeune Compagnie de Jésus à s’y consacrer. Pierre Canisius, né en 1521 à Nimègue aux Pays-Bas, se décida, après de solides études à Cologne, et y ayant rencontré Pierre Favre, un des premiers compagnons de saint Ignace de Loyola, à entrer dans la Compagnie. Il entreprit de combattre la Réforme luthérienne, sans se départir de sa douceur et même de sa tendresse pour les Réformateurs. Il traduisit les Pères de l’Église et rédigea en 1554 un Catéchisme en six tomes, qui connut un immense succès. Pour cela, il a été proclamé Docteur de l’Église. Ce catéchisme, publié en latin, était destiné aux étudiants, mais il exista assez vite des versions allemandes, pour le peuple et même pour les enfants.
Le concile de Trente, de son côté, n’était pas resté inactif. Les Pères conciliaires, « voulant absolument combattre un mal si grand et si funeste [l’ignorance religieuse] par un remède efficace, non seulement ont pris soin de bien définir contre les hérésies de notre temps les points principaux de la doctrine catholique, mais, de plus, ils se sont fait un devoir de laisser, pour l’instruction des chrétiens sur les vérités de la Foi, une sorte de plan et de méthode que pourraient suivre en toute sûreté dans leurs églises ceux qui auraient la charge de Docteur et de Pasteur légitime [5] ». Cette résolution fut adoptée au cours de la dix-huitième session (26 février 1562) sur la suggestion de Charles Borromée. Le saint archevêque milanais donnait alors toute la mesure de son zèle à réformer son clergé. Il supervisa la rédaction du texte original en italien. Ce travail fut achevé en 1564 et publié d’abord en latin (et en italien) sous le titre Catechismus ex decreto Concilii Tridentini ad parochos Pii V jussu editus (Rome, 1566). Le Concile ordonna des traductions en toutes les langues vernaculaires.
La Préface de saint Charles Borromée est un vrai traité de catéchèse.
Le catéchisme de Trente est divisé en quatre parties : 1. du symbole des Apôtres, 2. des sacrements, 3. du Décalogue, 4. de la prière. Ce sera le plan des catéchismes à venir, même si parfois une partie est placée avant l’autre, ces quatre documents (Credo, Décalogue, Pater, septénaire sacramentel) constituant la base de toute formation chrétienne digne de ce nom.
En 1597, saint Robert Bellarmin rédigea à son tour un catéchisme à l’usage des frères coadjuteurs de la Compagnie de Jésus, document qui sera ensuite approuvé et utilisé par le Siège apostolique. Il fut aussi traduit en français par saint François de Sales, en 1601. Dans la deuxième moitié du XVIIe siècle est publié un catéchisme rédigé par Bossuet, initiative suivie par de nombreux évêques pour leur diocèse, jusqu’aux XIXe et XXe siècles. En 1806, un catéchisme national français, dit impérial, fut rédigé sous le contrôle de Napoléon, marquant une volonté d’unification, mais en vain : pendant tout le XIXe siècle des évêques continuèrent de composer leur catéchisme, dans un souci d’adaptation aux réalités locales.
Ce qui n’empêcha pas saint Pie X, en 1906, de réaliser un nouveau catéchisme afin de répondre aux difficultés de l’heure, au lendemain de la crise moderniste. Le catéchisme, comme on le voit, devait répondre de plus en plus à deux objectifs : 1. une formation complète et cohérente de la foi, 2. une riposte aux thèses adverses (généralement celles des protestants, mais de plus en plus celles du scientisme, du positivisme, etc.).
Le temps des incertitudes
En 1937, parut la première édition du Catéchisme à l’usage des diocèses de France, qui sera modifié par l’épiscopat français en 1947, et accompagné d’une édition pour les enfants (Petit Catéchisme illustré). Mais cela ne limita pas la floraison de catéchismes divers (bibliques, liturgiques, etc.), à mesure que nouvelles attentes se faisaient jour. En 1967, commencèrent des séries de publications destinées à accompagner la formation des différentes classes d’âge et à fournir des « parcours catéchétiques ».
De plus en plus, la catéchèse, surtout celle destinée aux jeunes, se trouva absorbée par des questions de méthode. Souhaitant à juste titre tirer parti des découvertes de la pédagogie, l’attention se concentra, non plus sur le contenu – généralement de plus en plus léger –, mais sur les méthodes : ayant rejeté le système des questions et réponses qui depuis le début accompagnait l’activité catéchétique, on se lança dans des parcours souvent complexes, où la richesse des images, la variété du matériau plus ou moins ludique, ne parvenaient pas à cacher l’indigence de la proposition doctrinale. Surtout, on fit une place démesurée à des hypothèses exégétiques qui bouleversaient la présentation de l’histoire sainte. Dans les années 80, le trop célèbre recueil intitulé Pierres vivantes refusait de partir de la création du monde et voulait retrouver l’origine de l’aventure de Dieu avec son peuple à partir de l’évènement supposé premier : la sortie d’Égypte, selon l’idée, alors à la mode, selon laquelle la Bible serait partie du Dieu sauveur avant d’accéder à la vision du Créateur du ciel et de la terre. La conférence marquante du cardinal Ratzinger à Paris en 1988 souligna bien les problèmes de la catéchèse en France et dans le monde et servit à beaucoup d’utile prise de conscience.
Après des années où il était difficile de présenter une synthèse organisée de la foi, le Credo du peuple de Dieu du pape Paul VI, publié à l’occasion de l’année sainte de 1975, redonna courage à tous ceux qui cherchaient à défendre et mettre en valeur l’intégralité de la foi de l’Église. Des tentatives de catéchisme pour adulte, qui n’étaient pas, comme le catéchisme des évêques hollandais [6], un effort douteux pour tenter de moderniser l’expression de la foi, virent le jour. En 1991, le Catéchisme pour adultes des évêques de France se révéla un effort courageux pour articuler dans un langage accessible la totalité des vérités de la foi [7]. Et surtout, en 1992, le Catéchisme de l’Église catholique, promulgué par Rome, fut un événement éditorial et un pas important. Il n’a cessé depuis de nourrir la réflexion des catholiques. Abrégé, édition pour les jeunes, se sont succédé, et le Catéchisme continue d’irriguer tout l’effort de la nouvelle évangélisation. À ce propos, Benoît XVI rappelle que son prédécesseur, le pape Jean-Paul II, a donné là à l’Église un « critère sûr », soulignant combien on a besoin d’une théologie « ouverte aux vraies nouveautés de la Parole de Dieu, révélée en tous temps y compris en notre temps ».
Alors, rivalité ou complémentarité ?
En fait le catéchisme est l’expression de la théologie. Il ne cherche en aucune manière à lui faire concurrence, mais bien plutôt à la servir dans la présentation des vérités de la foi et des moyens de sanctification. Ils sont liés l’un à l’autre.
Dans son exhortation apostolique Catechesi tradendæ, du 16 octobre 1979, le pape Jean-Paul II soulignait (n. 61) :
À l’évidence, il faut que la catéchèse parte de la foi, telle que la théologie en a précisé les contours, elle doit se méfier d’un saut direct dans la parole biblique, qui supposerait que celle-ci puisse, sans la médiation, être directement accessible. Et, comme de fait elle ne l’est pas et que beaucoup de textes sont difficiles ou peuvent être pris à contresens, le catéchiste est aujourd’hui réduit à chercher une interprétation personnelle – qui restera toujours dépendante des idées et des valeurs de son temps et de son milieu. Finalement, on transformera la lecture de la Parole de Dieu en un pâle décalque de l’idéologie de la société libérale. Faute de la tradition de l’Église, de son dogme et de sa liturgie, c’est l’herméneutique du moindre effort qui l’emportera. Toutes les guérisons de Jésus convergeront dans l’idée qu’il faut accueillir les exclus et soutenir les laissés pour compte, ce qui n’est pas faux, mais tout de même un peu court. La messe sera un rassemblement sympathique où on dit merci à Jésus pour l’amour qu’il nous a montré (eucharistie ne veut-il pas dire : action de grâce ?). Et ainsi de suite...
C’est le plus fort de la pensée théologique de l’Église dont ont besoin les plus petits de nos frères. Il ne leur faut pas un christianisme simplet et moralisant, ils méritent qu’on se mette en peine de leur partager les plus hautes intuitions de saint Augustin. Même ceux que l’on juge très loin ont un cœur fait pour vibrer à l’unisson de la contemplation des saints et des mystiques. Mais cela demande que le catéchiste ne se contente pas pour lui-même du minimum...
C’est pour ces raisons qu’il est nécessaire que ceux qui sont appelés à la si belle mission de catéchistes qu’ils continuent à approfondir le contenu de la foi en se laissant enseigner par la théologie, la vraie. Qu’ils puissent participer de tout leur être à la liturgie pour devenir des adorateurs en esprit et en vérité, et qu’ils laissent le Seigneur Esprit Saint prendre possession de leur être et développer en eux la vie intérieure. Y a-t-il meilleur exemple que celui de la Très Sainte Vierge Marie à qui Jésus avait confié la garde de Son Église, elle qui repassait toutes ces choses en son cœur ?
Oui, il est temps de retrouver l’élan des premières communautés chrétiennes, l’élan des saints Pasteurs, des martyrs, qui surent unir, au cours des siècles, fidèles à l’action de l’Esprit Saint, la recherche passionnée de la Vérité, la louange divine, et l’union de plus en plus profonde à cet Amour qui nous sauve. Alors nous pourrons, ainsi régénérés et fortifiés, parvenir à la stature de l’Homme Nouveau. Nous pourrons transmettre jusqu’aux extrémités de la terre, ce que nous avons reçu, en toute fidélité, en Église et par l’Église, jusqu’au retour du Christ dans la Gloire.
Gabriel Nanterre, Gabriel Nanterre, agrégé de Lettres classiques, ancien assistant à la Faculté des Lettres de Paris XII.
Sr Marie-Lucile Boeuf, a fait profession en 1973 dans la Congrégation des Sœurs de la Sainte Famille du Sacré-Cœur ; actuellement consacrée de la communauté Aïn Karem, elle enseigne le catéchisme depuis de nombreuses années dans diverses paroisses parisiennes.
[1] Définition issue du site Croire.com.
[2] Saint Cyrille de Jérusalem, Catéchèse baptismale.
[3] Concile Vatican ii, Sacrosanctum Concilium, 10.
[4] YouCat, 169.
[5] Charles Borromée, préface au Catéchisme du concile de Trente.
[6] Une Introduction à la foi catholique, Utrecht 1966, trad. fr.1968.
[7] Les évêques belges avaient déjà fait paraître en 1987 un Livre de la foi plus solide que le « catéchisme hollandais ».
[8] Paul VI, Exhortation apostolique Quinque iam anni, AAS 63 (1971).
[9] Jean-Paul ii, encyclique Redemptor hominis, n. 10.