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Les Témoins de la Résurrection de Jésus. Du tombeau vide à l’Ascension

2. Les apparitions de reconnaissance, Thomas Kowalski, Parole et Silence, Cahiers de l’Ecole Cathédrale, n°51, 2002
Charles-Olivier Stiker-Métral

Cet ouvrage, le premier d’une série de trois volumes interrompue par le décès brutal du P. Kowalski, professeur d’Ecritures Saintes à l’Ecole cathédrale de Paris, vient combler un vide en proposant un ouvrage destiné au grand public sur la difficile question des évangiles de la Résurrection. Depuis l’ouvrage de Pierre Benoît, aujourd’hui un peu dépassé, le grand public pouvait surtout disposer du travail de Xavier-Léon Dufour, essentiellement préoccupé par la traduction littéraire de l’événement, et des pages denses et ardues de H. Urs von Balthasar dans Pâques, Le mystère. La méthode comme les conclusions de Thomas Kowalski, formé à l’Ecole Biblique de Jérusalem, apportent par conséquent plus qu’une synthèse sur la question.

Le présent volume est consacré aux apparitions de reconnaissance, autrement dit aux premières apparitions, dans la semaine qui suit Pâques, tandis que le premier volume, s’il voit le jour, devrait traiter de la question du tombeau vide et le troisième des apparitions de mission. L’exégète s’attache aux apparitions à Marie-Madeleine, aux disciples d’Emmaüs, à Pierre, au Cénacle, à Thomas, et, enfin, à ce qu’il nomme « le rendez-vous en Galilée », qu’il identifie à l’apparition aux cinq cents mentionnée par Paul. Toutes, bien entendu, ne se situent pas sur le même plan, mais le déroulement même de l’ouvrage, qui entend prendre les apparitions dans l’ordre chronologique, rompt avec d’autres approches, qui classaient plutôt les apparitions en apparitions publiques et apparitions privées, entre apparitions aux femmes et aux apôtres, ou encore selon le lieu (Jérusalem et Galilée). Si ces questions ne sont pas absentes, elles ne constituent pas la problématique de l’étude.

Le P. Kowalski passe ainsi en revue un certain nombre de questions (identité de Marie-Madeleine, de Cléophas, localisation d’Emmaüs...) et propose de séduisantes interprétations de la plupart des grands récits d’apparitions. Il fait également le point sur l’apparition à Pierre, mentionnée en 1 Co 15 et en Lc 24, 34, et dont il voit le récit en Jn 21, séparant donc l’épisode de la pêche miraculeuse du dialogue entre Pierre et le Ressuscité.

Mais la vraie nouveauté de l’ouvrage est sans conteste le chapitre sur l’apparition en Galilée. En croisant les sources textuelles (essentiellement Jn 21, minutieusement examiné) et les données de l’archéologie et de l’Histoire, le P. Kowalski propose de situer l’apparition en Galilée au lieu dit des « sept sources », longtemps considéré - à tort, semble-t-il - comme le lieu de la première multiplication des pains. L’auteur reconstitue la tradition orale qui permet d’identifier l’épisode commémoré à cet endroit comme étant en réalité l’apparition galiléenne, antérieure aux traditions écrites.

On regrettera toutefois qu’à aucun moment ne soit proposée une vraie ligne directrice, dont les fondements soient clairement précisés. En effet, s’il y a beaucoup à apprendre dans cet ouvrage, on n’y trouvera pas de méthode pour lire comme un tout les Evangiles de la Résurrection. Le risque, pas toujours évité, est celui d’une fragmentation qui envisage chaque épisode en lui-même, au détriment de sa relation avec les autres récits. Mais il faut reconnaître à cet ouvrage le mérite essentiel de tenter de reconstituer un scénario primitif qui a été ensuite « mis en texte » (ce que se refusait à faire, malgré tout son intérêt, l’ouvrage de X. Léon-Dufour). Le P. Kowalski permet donc une lecture de ces Evangiles qui ne renie pas l’examen historique, mais qui lui ajoute une réelle attention à leur sens typologique, à la richesse des réminiscences bibliques inscrites dans la culture des premiers chrétiens, à la prégnance des traditions orales. Bref, ce travail sait rendre à ces textes difficiles toute leur saveur et en faciliter la lecture à tous.

Les quelques lignes se voudraient un hommage à l’enseignant et au chercheur trop tôt disparu, dont cet ouvrage constitue en quelque sorte le testament exégétique.

Charles-Olivier Stiker-Métral, né en 1976, marié, pensionnaire de la Fondation Thiers.

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