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Teilhard posthume, Réflexions et souvenirs, précédé de Blondel - Teilhard de Chardin, Correspondance 1919 (Cardinal Henri de Lubac)

Cerf, Paris, 2008, 442 p.
Jean Lédion

La collection des œuvres complètes du cardinal de Lubac est prévue avec un découpage en douze sections. L’une d’elles, la septième, est exclusivement consacrée aux écrits du P. de Lubac concernant la pensée de Teilhard de Chardin. Quatre volumes sont prévus dans cette section, dont trois sont déjà parus. L’ouvrage qui fait l’objet de cette recension est particulièrement intéressant car, datant de 1977, il est en quelque sorte l’aboutissement de la réflexion du cardinal sur l’œuvre de son confrère et ami, le P. Pierre Teilhard de Chardin, mort en 1955. A cette époque, les polémiques autour de Teilhard commencent à s’apaiser, tandis que les souvenirs personnels de l’auteur se sont décantés.

Ce que veut Lubac, c’est défendre la mémoire et l’œuvre de son ami qu’il considère, à juste titre, comme calomnié aussi bien par ses censeurs que par certains de ses admirateurs, pas toujours éclairés. Le présent volume est là pour rappeler au lecteur, avec toutes les références nécessaires, ce qu’a été ce savant contesté. Tout d’abord le cardinal établit que Teilhard a toujours été profondément catholique et que sa foi, des plus traditionnelles, n’a jamais erré. De plus, il montre que sa formation théologique était « classique » pour un religieux de cette époque. Un autre point évoqué, qui n’est pas sans importance, c’est que Teilhard a toujours été un chrétien soucieux de respecter le magistère, tout au long de sa carrière de penseur, et qu’il n’a jamais cherché à promouvoir des voies aventureuses. Cela étant, l’œuvre originale de Teilhard, à côté de son travail de scientifique, a été de vouloir renouveler les bases de l’apologétique chrétienne.

Jusqu’alors (en ce début du XXe siècle), dans la plupart des milieux théologiques, on était resté très méfiant vis-à-vis des nouveautés apportées par les développements scientifiques du siècle écoulé. Le monde que découvrait le paléontologue Teilhard de Chardin n’était plus celui de la philosophie d’Aristote, et toute sa réflexion avait pour but d’intégrer cette situation nouvelle dans la réflexion chrétienne. Ses essais successifs, écrits dans un langage quelque peu lyrique, n’avaient d’autre but que d’ouvrir une voie qui puisse conduire au Christ. Ensuite, le jugement porté sur cette œuvre peut être divers, mais ce que veut rappeler Lubac, c’est qu’avant de juger une œuvre il faut l’avoir lue et travaillée, et ne pas tirer des conclusions hâtives basées sur des citations tronquées de seconde ou de troisième main ! Là encore, Henri de Lubac nous donne une leçon de rigueur intellectuelle, rigueur qui fait bien souvent défaut dans les nombreuses publications qui sortent aujourd’hui.

Jean Lédion, marié, trois enfants. Diplôme d’ingénieur, docteur d’État ès Sciences Physiques. Enseignant dans une école d’ingénieurs à Paris.

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